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Arrêt inattendu des pluies à Cotonou, Calavi et environs: pratiques endogènes ou technologiques liées aux chantiers en cours ?

Arrêt inattendu des pluies à Cotonou, Calavi et environs: pratiques endogènes ou technologiques liées aux chantiers en cours ?

Les mois de juin et juillet sont habituellement consacrés à la saison des pluies qui démarre en avril, au sud du Bénin. Mais les précipitations, ont depuis un moment, cessé dans les villes de Cotonou, Abomey-Calavi et environs laissant place à une fraîcheur inhabituelle. Une situation difficilement vécue par les populations qui y voient des mains invisibles utilisant des techniques endogènes pour bloquer les pluies à cause des chantiers en cours dans ces villes. Pendant ce temps, les experts en climatologie parlent de dérèglements climatiques et alertent sur les conséquences aussi bien sur l'environnement que sur la sécurité alimentaire.  

Samira ZAKARI

Le sud du Bénin contrairement au nord, dispose de deux saisons pluvieuses. Il s'agit selon le climatologue Thibaut Assouadelor, d'une grande saison des pluies qui démarre en avril pour finir en mi-septembre et d'une petite saison qui s'étend sur la période de mi-septembre à octobre.

Cependant, contrairement à ce calendrier connu des précipitations, les pluies sont devenues rares ou absentes dans cette partie du pays depuis le mois du juin. «Les pluies cette année, se sont vraiment faites désirées. À peine nous avons eu quelques grandes pluies. C'est triste», a déploré Jean D, un habitant du quartier Ouèdo à Abomey-Calavi. Cette rareté des précipitations est mal vécue par les agriculteurs qui y voient des mains invisibles qui bloquent les pluies à cause des chantiers.

Blocage des pluies par des moyens endogènes ou dérèglement climatique ?

Les villes de Cotonou et Abomey-Calavi sont en chantier ces dernières années avec la construction d'infrastructures routières et autres en cours. Une situation qui serait à l'origine de cette rareté des pluies selon certains citoyens comme Yves T. À l'en croire, «il n'y a aucun doute que les pluies soient bloquées par des moyens surnaturels pour que cela ne perturbe pas la réalisation des chantiers. Souvent les nuages se forment bien, annonçant la venue des pluies. Mais la minute d'après, tout disparaît. Ça a toujours été comme ça durant cette saison», a-t-il tristement confié. Mais contrairement à cet avis soutenu par Yves T, le climatologue Thibaut Assouadelor pense plutôt aux effets des changements climatiques. «La rareté actuelle des pluies à Cotonou, Calavi et ses environs n'est pas une anomalie mystique mais bien une manifestation possible des variabilités climatiques naturelles ou d'un dérèglement climatique global en cours», a-t-il expliqué. Plus loin, il indique que les vents venant de l'océan atlantique apportent de l'humidité qui entraîne les pluies. «(...) La mousson ouest-africaine est en quelque sorte un moteur principal des pluies dans notre région. C'est un courant d'air humide qui vient de l'océan Atlantique, souffle vers l'extérieur du continent et provoque des pluies lorsqu'il rencontre l'air plus sec venant du Sahara. Normalement entre le mois d'avril et juillet, cette mousson est bien installée dans le sud du pays et apporte beaucoup d'humidité depuis la mer. Et cette humidité monte dans l'air chaud, forme des nuages épais qui donnent des pluies régulières. Mais quand cette mousson est faible et mal orientée, il y a moins de pluies même en saison pluvieuse», explique le climatologue Thibaut Assouadelor. Et cette situation d'absence des pluies a bien des conséquences sur le plan agricole avec la baisse de production des cultures de saison comme le maïs et le manioc.  

Absence de pluies, un coup pour la croissance des cultures 

L'eau est l'essence dont a besoin la plante pour son développement. Alors il n'y a aucun doute que l'absence de pluies au moment où elles sont attendues, ait des impacts négatifs sur la croissance des cultures. «J'ai semé du maïs et au moment où la pluie devait venir pour booster la levée des jeunes plants, elle a cessé. Les plants ont fané et sur les 3 sacs que j'ai l'habitude de récolter, j'ai pu avoir à peine un sac et demi cette année», s'est plaint Yves T. D'ailleurs, son cas est la réalité de plusieurs agriculteurs de ces deux villes et environs. Toute chose qui pourrait affecter la sécurité alimentaire. «Quand l'agriculture est touchée, la nourriture devient plus rare. Et quand c'est ainsi, les prix connaissent une hausse sur le marché au désavantage des familles démunies. Ce qui constitue un gros risque pour la sécurité alimentaire», a alerté le spécialiste. 

De même sur le plan environnemental, cet arrêt brusque des pluies est la conséquence de la fraîcheur inhabituelle actuellement en cours. «L'air frais actuel qui souffle ici ne provient pas du nord. Il s'agit bien de l'air marin humide mais frais», a fait constater Thibault Assouadelor.

Cependant, le climatologue alerte également sur un éventuel retour brusque des pluies qui pourrait entraîner des situations dommageables comme les inondations. Au regard à ces dérèglements climatiques qui affectent de plus en plus les habitudes de vie, Thibaut Assouadelor invite à un renforcement de capacités pour l'adaptation face au changement climatique. Ce qui passe naturellement par l'adoption de comportements éco-citoyens.

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